Tous assistés ? La solidarité en débat [Projet N°391]

 

 

La pandémie du Covid-19, qui a donné lieu à bien des actes de solidarité, a permis un retour en force de l’État providence. En d’autres termes, en période de naufrage, l’État a retrouvé son rôle de protecteur et de régulateur du modèle économique. Simple parenthèse heureuse ? On a l’impression à présent que l’on « repart comme en quarante ». En témoigne le retour fortement médiatisé de la vieille rhétorique sur les « assistés » et les « paresseux ». Même la gauche – on l’a vu à la « fête de l’Huma » –, se déchire sur l’« assistanat »1.

Face à l’accumulation de crises, il serait irresponsable de se limiter au registre de l’urgence et des petits gestes individuels. Quel modèle économique et social voulons-nous construire ? Plus que jamais, la notion de solidarité mérite d’être décortiquée et débattue. Souvent caricaturée, elle reste le socle indispensable de toute vie sociale. Ce dossier de la Revue Projet invite à redessiner cette forme si singulière du lien social : à l’aune des défis contemporains, pourquoi être solidaire ? Avec qui, et à quelle échelle ?

Pour répondre à ces questions, nous donnons la parole à des chercheurs issus de différentes disciplines : sociologue, historien, anthropologue, économiste… Parmi ces derniers, plusieurs partagent leurs questionnements et hypothèses à l’occasion de la sortie d’un ouvrage : le sociologue Serge Paugam présente les coulisses d’une vaste enquête internationale et les raisons pour lesquelles l’attachement social peut nous aider à repenser les fondements de la solidarité humaine. Quant à l’anthropologue Michel Agier, il part de son essai sur l’indésirabilité. Si les politiques de la peur et de la haine des autres détruisent tout élan de solidarité, l’auteur convoque trois notions africaines pour retrouver le sens et le courage de la vie commune.

Ce dossier revient également sur le mouvement des Gilets jaunes, la situation à Calais ou encore les sociétés nordiques, trop souvent idéalisées en matière de solidarité. En guise de conclusion et d’ouverture, nous proposons quatre points saillants. Un autre monde est possible. La solidarité renvoie, par définition, aux modes de gouvernance de la cité et, par conséquent, aux choix politiques que nous faisons, ou pas.

Voir le site de la revue Projet.

 

Pliés-dépliés

Sommaire du dossier

« L’attachement à plein régime » propos recueillis par Benoît Guillou. Entretien avec Serge Paugam, sociologue, directeur de recherche au CNRS et directeur du Centre Maurice Halbwachs (EHESS).

« Vie commune. Ici et ailleurs » par Michel Agier, anthropologue et ethnologue, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales.

« Le lien par le lieu » par Mathilde Caro, docteure en sociologie de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Chargée d’études à la Ville de Paris.

« La dette humaine » par Virgile Chassagnon, économiste, directeur de l’école doctorale de sciences économiques à l’Université Grenoble Alpes, spécialiste de l’histoire de la pensée économique et du lien entre capitalisme et inégalités.

« Impôt de solidarité » propos recueillis par Jean-Baptiste Seby, doctorant au Massachusetts Institute of Technology (MIT). Entretien avec Lucas Chancel, économiste, spécialiste des inégalités et de l’environnement, co-directeur du Laboratoire sur les inégalités mondiales à l’École d’économie de Paris.