World Wide Views on Climate and Energy

Le 6 juin 2015 a eu lieu le débat citoyen planétaire sur le climat et l’énergie (World Wide Views on Climate and Energy)

 

97 débats ont été organisés dans 76 pays, associés à cette initiative. L’objectif est de permettre aux citoyens de se saisir des enjeux des négociations internationales en formulant un certain nombre de recommandations qui seront présentées aux négociateurs dans un second temps.

Un débat a été organisé à Paris dans les locaux du ministère de l’écologie par le Secrétariat de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC), la Commission nationale du débat public (CNDP), le Danish Board of Technology Foundation et le cabinet Missions Publiques. L’initiative a été labellisée COP21, et le Secrétariat de la CCNUCC l’a reconnue comme faisant partie du processus de négociation.
L'objectif était de mobiliser l'expertise acquise depuis de nombreuses années par le DBT sur la question de la participation citoyenne et des conférences de consensus, en l'appliquant à une échelle internationale sur la question du changement climatique. En ce sens, cette initiative s'inscrit dans une volonté, portée par des ONG, des experts, des élus, d'approfondir la démocratie, ou, a minima, de faire émerger d'autres considérations – celles de citoyens ordinaires – que celles des lobbys et des intérêts étatiques dans les négociations sur le climat, et d'accroître la conscience du public sur les questions relatives aux enjeux environnementaux.
Dans chaque pays, une centaine de citoyens, représentatifs de leur population, ont participé à une journée d’information et de délibération leur permettant de se former une opinion éclairée et de donner leur avis sur une série de sujets-clef qui seront au cœur des négociations de la 21ème Conférence des Parties (COP21), qui aura lieu à Paris en décembre 2015. Les rencontres ont débuté dans les îles du Pacifique et se sont conclues sur la côte Ouest des Amériques.

Présentation de la procédure

D'un point de vue procédural, les WWV reprennent assez largement les principes des conférences de consensus et plus encore ceux du 21st Century Town Meeting d'America Speaks. Contrairement à ce dernier toutefois, les participants aux WWV furent effectivement tirés au sort afin de constituer un échantillon représentatif ou diversifié de la population dans chacun des pays concernés.
À partir de documents d’information et de 5 vidéos pédagogiques, ces citoyens ont travaillé par groupes de 6 à 8, sur les 5 thèmes de la COP de Paris. Dans chacun des pays, la centaine de participants était divisée une dizaine de tables au sein d'une même salle, et la discussion animée par un facilitateur neutre, et relativement spécialiste de ce genre d'évènements. Au terme de chaque séquence de discussion, les participants devaient remplir un court questionnaire relatif aux grandes questions ayant structuré le débat précédent. Les résultats de ce qui était présenté comme un « vote », étaient projetés à la fin de la journée, et permettaient une comparaison entre pays.
La compilation des résultats alimentera ensuite une étude comparative sur les 78 pays invités à s’exprimer sur l’enjeu climatique. Un résumé pour décideurs a été produit dès le 15 juin 2015.

Les 5 grands thèmes et le résultat des discussions

 

Voici la synthèse des avis exprimés sur les 5 grands thèmes :
A. L’importance de lutter contre les changements climatiques
1. 78% des citoyens du monde se sentent très concernés par les changements climatiques. Ils sont 82% en Afrique (90% au Maroc) et 87% dans les îles (98% aux Philippines). Les citoyens du Japon (44%) et de Russie (49%) sont les moins concernés. Les citoyens très concernés sont globalement en nette progression depuis quelques années.
2. Les mesures pour lutter contre les changements climatiques sont une opportunité pour améliorer notre qualité de vie pour 2 citoyens sur 3. Ces chiffres sont beaucoup plus importants dans certains pays émergents, notamment l’Inde et le Brésil, et en Amérique latine. Dans de nombreux pays, les gouvernements hésitent à prendre des mesures fortes, considérant que les citoyens ne sont pas prêts. Les citoyens apportent ici un démenti.
3. Les résultats des négociations des Nations Unies sur le climat depuis 1992 sont insuffisants pour 71% des citoyens. Les plus critiques sont les brésiliens (93%), les américains du Nord (89%), les européens (80%), et les indiens (80%).
4. 63% des citoyens considèrent que tout doit être fait à Paris pour limiter le réchauffement de la température à 2°C. Les plus volontaristes sont les européens (74%). Les chinois sont très en retrait (27%).
5. 70% des citoyens considèrent que la lutte contre les changements climatiques est essentiellement une responsabilité mondiale, 48% que c’est essentiellement une responsabilité des citoyens
B. Les outils pour lutter contre les changements climatiques
1. Globalement, 88% des citoyens sont favorables à une taxe carbone, et 98%au Sénégal (98%) ; la majorité d’entre eux souhaitent qu’elle s’applique à tous les pays, mais avec des coûts plus élevés pour les pays qui ne réduisent pas leurs émissions. Les citoyens les plus hostiles sont ceux des États-Unis, de Russie ou de Chine.
2. L’outil privilégié par les citoyens pour réduire les émissions de gaz à effet de serre est la mise en place de programmes éducatifs destinés au grand public : 78% (valeur pratiquement constante dans tous les pays).
3. 45% des citoyens souhaitent que l’on arrête toute exploration pour trouver des combustibles fossiles. Les citoyens des pays exportateurs de pétrole sont tout de même 34% à approuver cette mesure.
C. Les négociations des Nations Unies et les engagements nationaux
1. L’appréciation de la manière dont chaque pays combat le changement climatique est particulièrement éclairant :
- le changement climatique est une priorité nationale et c’est normal pour 44% des citoyens du monde (seulement 25% en France) ;
- le changement climatique n’est pas une priorité nationale, mais devrait l’être pour 46% (65% en France, 84% au Brésil et 76% au États-Unis).
2. Autre résultat absolument remarquable : 79% des citoyens considèrent que leur pays devrait prendre des mesures afin de réduire ses émissions de gaz à effet de serre, même si beaucoup d’autres pays ne prennent pas de mesures. Ils sont 95% aux États-Unis et au Brésil.
3. Un accord à Paris devrait comporter un objectif mondial à long terme, pour arriver à zéro émission de gaz à effet de serre à la fin du siècle, juridiquement contraignant pour tous les pays, pour 68% des citoyens du monde (90% au Pérou et 80% en Allemagne). Les efforts des pays en développement devraient dépendre du soutien financier des pays développés pour 82% des citoyens (complètement ou en partie).
D. L’équité et le partage des efforts
1. La meilleure base pour fixer l’ambition des contributions nationales en faveur du climat sont les émissions actuelles ou anticipées (39%) devant les émissions historiques (passées).
2. 79% des citoyens pensent que les pays à haut revenu devraient payer plus que le montant convenu pour l’atténuation et l’adaptation des pays à faible revenu (100 milliards de dollars) (96% au Sénégal).
3. Une très large majorité (86%) considère que les contributions du secteur privé doivent être comptabilisées.
4. Plus de la moitié des citoyens (56%) sont favorables à la création d’une troisième catégorie de pays, les pays en développement les plus riches, avec plus de responsabilités.
5. Les efforts des pays en développement devraient dépendre du soutien financier des pays développés pour 82% des citoyens (complètement ou en partie).
6. Les autorités locales, y compris les villes, devraient avoir accès au Fonds vert pour le climat selon 76% des citoyens (et 89% au Bangladesh).
E. Faire des promesses en faveur du climat et les tenir
1. 50% des citoyens demandent que chaque pays ait le droit d’examiner les rapports des autres pays sur leurs efforts d’adaptation ou d’atténuation (66% des russes et 35% des indiens).
2. Un accord à Paris devrait comporter des objectifs nationaux à court terme, juridiquement contraignants pour tous les pays (71%).
3. 90% des citoyens du monde pensent que tous les pays devraient publier un rapport annuel sur leurs émissions et les progrès réalisés.