Paris 2024 : Plus vite, plus haut, plus fort ? [Projet n°394]

Présentation du numéro

Quatre cents jours, c’est maintenant. Les Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris 2024 débuteront officiellement le 26 juillet de ladite année. L’échéance anime déjà les organisateurs et leurs partenaires avec autant d’intensité qu’une course de 110 mètres haies. Or l’épreuve est ici bien moins balisée.

Ces Jeux iront-ils encore « plus vite, plus haut, plus fort », selon la formule fondatrice du baron Coubertin ? Avec la France dans le « top 5 » des nations les plus titrées, selon le vœu du président Macron ? La performance sportive n’est pas seule juge de la qualité de l’événement et des « valeurs » qu’il entend véhiculer. Pour quel collectif se dérouleront ces JOP, qui se réclament de l’inclusion et du développement durable ?

L’enjeu revêt une importance particulière pour la Seine-Saint-Denis, lieu phare des Jeux, où la Revue Projet est elle-même implantée. Jeune et créatif, mais souffrant de difficultés économiques et d’une mauvaise image sécuritaire, le département profitera-t-il, en retour et dans la durée, des investissements engagés en son sein ?

La réponse à cette interrogation ne se limite pas à la création d’écoquartiers ou au déploiement d’équipements sportifs qui manquent cruellement au « 9-3 ». Des élus ici sollicités comme Mohamed Gnabaly, maire de L’Île-Saint-Denis, et Emmanuel Constant, vice-président départemental chargé du dossier olympique, savent où se situe le plus important défi : susciter l’appropriation des Jeux par les populations séquano-dionysiennes afin qu’ils soient une vraie fête populaire.

Il y a loin entre les valeurs brandies par Paris 2024 et celles prônées en son temps par Coubertin. Mais si l’inclusion a fait son entrée au rang des valeurs olympiques, l’imaginaire marchand et le culte du « dépassement de soi » restent centraux, affectant également les athlètes. Un idéal de croissance que dénonce le collectif Saccage 2024, sceptique quant à des Jeux écologiques et rassembleurs.

L’olympisme et ses valeurs se cherchent encore : dans une politique cohérente de professionnalisation du sport ; dans une éducation olympique en adéquation avec son temps : dans un héritage matériel et immatériel aujourd’hui inscrit dans la charte du Comité international olympique.

Le souvenir des Jeux de Londres de 2012 fait ici référence. Le paralympisme y a, pour la première fois, atteint le rang qu’il mérite. L’urbanisme y a gagné en durabilité. Pour autant, l’éviction des touristes habituels et la gentrification des quartiers rénovés ont déçu certaines ambitions. Le legs des JOP s’appréciera, de même, bien au-delà de la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques, le 8 septembre 2024. Quand la flamme sera déjà loin.

Par Benoît Hervieu-Léger

 

Dans la rubrique "exploration démocratique" 

Ce mois-ci, la parole est donnée aux trois chercheuses : Marion Carrel, Elisabetta Bucolo et Marianne De Laat. Elles co-signent un article autour de la notion de pauvreté dans une démarche de croisement des savoirs radical. Les autrices sont également membres du comité pédagogique de l'Espace collaboratif "Croiser les savoirs avec tou·te·s"

 

Pliés-dépliés

Sommaire du dossier

« Nouveau départ du 9-3 ? » par Dominique CharrierJean JourdanHugo BourbillèresMathieu DjaballahCharlotte Parmantier, sociologues du sport

« "Des compétences pour accueillir le monde" » Entretien avec Emmanuel Constant, vice-président du conseil départemental en Seine-Saint-Denis

« Pièces maîtresses des Jeux » par Robert Turgis, directeur de la Fédération des œuvres laïques en Seine-Saint-Denis

« Les jeux restent à faire » par Martin Citarella, Comité départemental olympique et sportif de Seine-Saint-Denis

« "L’écologie populaire, c’est notre base" » Entretien avec Mohamed Gnabaly, maire de L’Île-Saint-Denis

« Un modèle pédagogique ? » par Éric Monnin, historien et sociologue du sport

« Colosse aux pieds d’argile » par Pascal Balmand, délégué à l’écologie intégrale à la CEF, et Gilles Lecocq, docteur en psychologie

« Au revers de la médaille » par Philippe Gonigam, président de l’Union nationale des sportifs de haut niveau

« "Les JO ne peuvent pas être verts" » Entretien avec le Collectif Saccage 2024

« Influences mutuelles » par Sylvain Ferez et Sébastien Ruffié, spécialistes du handicap

« Record d’affluence ? » par Marie Delaplace, cofondatrice de l’Observatoire de recherche sur les méga-événements (Orme)

« La charge des héritages » par Cécile Collinet et Pierre-Olaf Schut, professeurs de sociologie et d’histoire du sport

« Trois points saillants. Une nouvelle ère de Jeux » par Gilles Lecocq, docteur en psychologie