Les sciences participatives, entre engagements citoyens et recompositions managériales de la recherche

Séminaire Politiques des sciences

séance du 12 mai 2016

EHESS, 105 bd Raspail, 75006 : salle 7, 18h-21h

Les sciences participatives, entre engagements citoyens et recompositions managériales de la recherche.

Depuis plusieurs années, des missions et des dispositifs institutionnels mettent en avant l'importance des formes de participation des publics à la formulation de questions de recherche, à la production de données, à des processus d'innovation, à la confrontation des expertises ou encore à l'interprétation collaborative de phénomènes observables.

Au niveau européen, de multiples incitations visent l'engagement des citoyens dans des protocoles de recherche.
En France, plusieurs rapports ont été produits dans le but d'identifier les "bonnes pratiques" et de définir des cadres et des protocoles "acceptables" pour les recherches participatives. Entre autres  :

C'est l'examen de ce dernier rapport qui sera au coeur des dicussions du séminaire. Bien qu'ouverte à la diversité des approches, l'institutionnalisation des sciences participatives suscite des controverses voire des polémiques. Les critiques viennent souvent de scientifiques défendant bec et ongles le monopole des savants en titre concernant toute activité de recherche et de hiérarchisation des savoirs, généralement au nom d'un éthos rationaliste ; mais elles proviennent aussi, en sens inverse, de groupes d'acteurs engagés dans la production d'alertes et de contre-expertises, intervenant souvent en appui à des mouvements sociaux, explorant plusieurs dimensions de l'"intelligence collective" et de la "science ouverte", en refusant le cadrage officiel des programmes de recherche ;on trouve également des critiques du recours aux "publics profanes" ou aux "amateurs", comme au "crowd founding", qui y voient une manière de délester les organismes publics de coûts de main d'oeuvre, voire une stratégie pour délégitimer des pratiques de recherche professionnelles et autonomes au profit de transactions continues avec la "société civile" dont les limites sont de plus en plus floues.En même temps, on voit émerger des agencements hybrides qui tentent de surmonter les tensions et les critiques en produisant de véritables transformations épistémiques.

Pour y voir clair dans la fabrique des "normes de gouvernance" associées aux sciences participatives, et pour expliciter les points de friction ou les appuis de la critique, la séance donnera tour à tour la parole à quatre intervenant-e-s qui ont développé, à des titres divers, un regard aiguisé sur toutes sortes d'expériences de recherche participative.

Marie-Christine Bagnati, Ministère de l'Environnement, de l'Energie et de la Mer, a coordonné les programmes REPERE et Concertation, Décision Environnement dans lesquels ont fleuri une multiplicité de partenariats entre laboratoires de recherche et associations, offrant un plan d'expérience assez inédit en matière de recherches participatives.

Philippe Chamaret, Directeur de l’Institut Ecocitoyen.Implanté au coeur de la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer, cet institut associe les populations à des études environnementales des pollutions. Une longue expérience au coeur de différents processus de concertation et de débat public.

Jean-Michel Fourniau, Directeur de recherche à l'IFSTTAR, co-fondateur et Directeur du GIS Démocratie&Participation qui fédère de nombreux chercheurs autour des enjeux démocratiques, des procédures de consultation et des formes d'expertise "dialogiques", "citoyennes" ou "participatives".

Isabelle Goldringer, Directrice de recherche à l'INRA (Génétique Quantitative et Évolution), également membre de la Fondation Sciences citoyennes, a particulièrement investi la question de la sélection participative qui a donné lieu à la production de savoirs alternatifs - en lien notamment avec les activités du Réseau Semences Paysannes.

Francis Chateauraynaud (GSPR, EHESS), co-organisateur du séminaire Politiques des sciences depuis sa création (2009), qui développe une sociologie des processus d'alerte, de controverse et d'expertise, dans lesquels toutes les formes d'agencements entre sciences et citoyennetés sont convoquées, assurera la présentation de la séance et l'animation des discussions.