Le tournant de la théorie critique

 

Le tournant de la théorie critique

Bruno Frère (dir.)

Desclée de Brouwer, « Solidarité et société »

2015

21 €

 

 

 

 

 

 

Aujourd’hui, le nombre de personnes précaires ne cesse de s’accroître. Elles composent une catégorie sociale qui recouvre à la fois les exclus et ceux qui connaissent un enchaînement de situations professionnelles éphémères et faiblement rémunérées. On observe à ce sujet au retour, parmi un grand nombre d’inégalités prégnantes (genres, races, etc.), d’une inégalité fondamentale entre classes sociales. Face à cet effrayant constat, et alors même que d’aucun la croyaient enterrée avec la « fin des idéologies » proclamée dans les années 80, la théorie critique se trouve remise au goût du jour. Le présent volume entend bien s’inscrire dans cette renaissance. L’enjeu singulier qu’il s’est fixer est de tenir compte des traditions allemande (l’école de Francfort) et française (la sociologie critique de Bourdieu), les tentatives de synthèses actuelles omettant toujours l’une ou l’autre d’entre-elles. Car si ces traditions doivent être impérativement tenue ensembles, c’est pour révéler ce qu’elles possèdent en commun et qui, précisément, doit à présent être dépassé, sans pour autant se départir de l’élan marxiste initial s’attaquant à toutes les formes de domination.

De Lukács à Bourdieu, en effet, tout se passe comme si la tradition critique européenne avait travaillé sur un seul schème de pensée : les individus reproduisent inconsciemment les structures sociales du capitalisme qui pourtant les aliènent. Ils acceptent les conditions qui leur sont faites et ne cherchent plus à se rebeller contre un système qui appauvrit leur travail, leur culture, leur âme elle-même. Pire : ils assurent la reproduction dudit système en cherchant à tout prix à s'adonner à la consommation de masse ou en glorifiant les valeurs dominantes. Les textes rassemblés ici entendent bien fonder le renouveau de la critique. Il s’agit pour eux de chercher à saisir l’homme existant ici et maintenant, comme étant potentiellement autre chose qu’un être profondément abâtardi, corrompu, dénaturé, perverti, altéré ou sali par le capitalisme et la domination. Car sans une telle transition au cœur même de la théorie critique, il s’avèrera à l’avenir extrêmement difficile de traiter des nouvelles formes de résistances à la domination (indignés, anonymous, mouvements des « sans », femen, casseurs de pubs, économie alternative, etc.).B

Table des matières

Introduction

« La relance de la critique », Bruno Frère, Chercheur qualifié du FNRS, Université de Liège, Sciences Po Paris 3

Partie I. Le mouvement des nouvelles théories critiques

  • Chapitre 1. « Sociologie critique, sociologie morale », Jean-Louis Genard, professeur à l’Université Libre de Bruxelles
  • Chapitre 2. « Pour une critique clinique », Thomas Périlleux, professeur à l’Université catholique de Louvain
  • Chapitre 3. « A la recherche des modernités possibles : espace d'interprétation et critique dans la société en réseaux », Vando Borghi, professore presso l’Università de Bologna
  • Chapitre 4. « L’avènement de l'intellectuel enraciné : nouvelles formes de critique et d'engagement publics », Patrick Baert, professor at the Cambridge University & Alan Shipman, professor at the Open University
  • Chapitre 5. « Une réconciliation entre Pierre Bourdieu et Luc Boltanski est-elle possible ? Pour un dialogue entre la sociologie critique et la sociologie pragmatique de la critique », par Simon Susen, Senior Lecturer, City University London

Partie II. Capacités critiques et théorie de la domination. Quelle complémentarité ?

  • Chapitre 6. « Situation de la critique », Luc Boltanski, directeur d’études à l’EHESS
  • Chapitre 7. « Qu’est-ce que la critique artiste ? », Jean De Munck, professeur à l’Université Catholique de Louvain
  • Chapitre 8. « Zizek et la critique radicale », Alain Eraly, professeur à l’Université libre de Bruxelles
  • Chapitre 9. « Autorités à l'épreuve de la critique. Jusqu'aux oppressions du “gouvernement par l'objectif” », Laurent Thévenot, Directeur d’études à l’EHESS
  • Chapitre 10. « L’ensauvagement du conflit social. Un regard sur les luttes pour la reconnaissance au début du 21e siècle », Axel Honneth, Professor an der Goethe-Universität Frankfurt am Main und an der Columbia University (New York)
  • Chapitre 11. « Pour une critique non culturaliste de la culture. Remarques à propos des classes sociales et des statuts sociaux dans le capitalisme globalisé », Nancy Fraser, Professor at the New School for Social Research (New York)

Conclusion

« La matérialisme est-il mort ? Petite critique de l’idéalisme critique », Bruno Frère, Chercheur qualifié du FNRS, Université de Liège, SciencesPo Paris

Postface,

Jean-Louis Laville, Professeur au CNAM

Bibliographie