Ce dont la gouvernance est le nom

 

Quels changements dans le gouvernement des sociétés ?
Instruments, rhétoriques et techniques du pouvoir aujourd’hui

 

11-12 février 2016 - Sciences po Aix

 

 

Colloque organisé par le CHERPA (EA4261, Sciences Po Aix) avec la participation du CERIC (UMR 7318 DICE, CNRS - AMU) et du GIS « Démocratie et Participation »

Jeudi 11 de 10h à 18h / Amphi Cassin
25 rue Gaston de Saporta – Aix-en-Provence

Vendredi 12 de 9h à 16h / Espace Philippe Séguin
31 avenue Jean Dalmas – Aix-en-Provence

 

Le mot gouvernance se signale par une incroyable diversité d’usages et sens. Pour comprendre sociologiquement la multiplicité des logiques qui accompagnent le recours au lexique et à l’ingénierie de la gouvernance dans les milieux décisionnels, il convient de les remettre en contexte. C’est-à-dire les saisir à l’état de pratiques mais aussi en tant que répertoires d’arguments et justifications de l’action publique, au-delà des préceptes affichés par la pensée gouvernancielle que sont l’« efficacité », la « participation » et l’« évaluation ». C’est là un premier objectif de ce colloque.

Un trait général sous-tend les multiples usages, à la fois politiques et savants, de la « gouvernance », c’est l’ambiguïté du message qui lui associé. On pourrait croire qu’il ne s’agit là que d’une illustration supplémentaire des ambivalences cultivées par le discours politique. Mais, plus que du flou, c’est en réalité une profonde contradiction qui traverse les pratiques de la gouvernance. D’un côté, un discours sans adversaire (ou presque), incarné par le visage ouvert et égalitaire de la participation aux décisions, l’appel si sympathique aux ONG et à la société civile. De l’autre, la face normative du « bon » management, technocratique et fort épris de gestion d’entreprise et de concurrence. Elle a été l’objet d’une forme de théorisation par des organisations internationales, appuyée sur le financement de certains travaux universitaires.

On nous affirme que tout cela est cependant compatible, et que c’est même aujourd’hui l’objet d’une nouvelle science de gouvernement « sans (trop de) gouvernement »… En omettant cependant de réfléchir aux oppositions entre objectifs égalitaires et concurrentiels, aux conflits entre des participants aux ressources asymétriques, aux tensions difficilement conciliables entre les multiples consultations participatives et la légitimité des assemblées représentatives ou encore aux contradictions entre une discipline de marché et la redistribution des ressources par l’État social. Sans parler de phénomènes comme la privatisation intense des normes publiques ou de la multiplication d’expertises auto-proclamées portant sur toutes les facettes de la vie sociale. C’est dans le contexte d’ensemble du « tournant néo-libéral » et de la « globalisation » qu’il faut resituer ces situations. Il nous faut donc dépayser le regard et prendre de la distance avec le discours normatif (gestionnaire comme participatif) de la gouvernance.

C’est là un second objectif essentiel du colloque. Cependant, ce « dépaysement » doit aussi être recherché dans l’espace, c’est-à-dire en confrontant la diversité des configurations politiques et des régimes à travers le monde. L’Europe et la sphère occidentale sont aujourd’hui obsédées par la crise financière, les recompositions du régime du Welfare et l’essoufflement de la démocratie parlementaire. Beaucoup d’approches de la gouvernance qui nous sont familières y font particulièrement écho. Or, les pays dits émergents (mais aussi ceux marqués par des processus de transition, de sortie de crise politique, ou en butte au « mal-développement ») sont aussi confrontés à des enjeux qui sont pour partie d’autre nature. Tels, le renouvellement en profondeur des élites politiques et administratives, la recherche de voies nouvelles de relativisation de l’autoritarisme, la lutte contre la pauvreté urbaine et les « retards » économiques, la transformation des rapports intergénérationnels et de genre, la pacification des sociétés et la résolution de conflits identitaires, ou encore la reconstruction d’États « faibles ». La référence à la gouvernance et aux pratiques de gestion ou de débat public qui y correspondent prend alors une autre portée. Il faut comprendre la manière dont les instigateurs comme les participants des dispositifs de gouvernance s’en saisissent, leur donnent spécifiquement sens et en font usage.

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