Rémi Fraisse : 3 ans plus tard, où en est la démocratie

   

COMMUNIQUE DE PRESSE

Mardi 24 octobre 2017

Rémi Fraisse : 3 ans plus tard,
où en est la démocratie ?

Il y a trois ans, Rémi Fraisse, un jeune bénévole de Nature Midi Pyrénées, mourait en défendant la zone humide du Testet contre le projet destructeur du barrage de Sivens. Nos pensées vont souvent vers lui, et particulièrement vers sa famille, à la veille de ce jour anniversaire, pour lui rendre hommage. Et réclamer que tout soit fait pour éviter qu’un tel drame ne se reproduise, grâce à une pratique de la démocratie environnementale digne de ce nom.

Plus jamais ça 

Qu’un citoyen meure en défendant pacifiquement une cause est inadmissible. L’Etat doit prendre toutes les précautions pour qu’un tel drame ne se reproduise pas. Au-delà des grandes postures sur les zadistes et l’autorité de l’Etat, le Gouvernement doit mettre en œuvre des solutions pour qu’à Notre-Dame-des-Landes ou encore à Bure, sur le site d’enfouissement des déchets nucléaires, la situation ne s’envenime pas. Cet été, des altercations graves ont eu lieu à Bure. Il est plus que temps de trouver les voies de la concertation plutôt que de tenter le passage en force. Car au-delà du drame humain, « Sivens » est l'illustration de l'échec total d'un processus légal respecté en façade mais en réalité vidé de toute substance : procédures bâclées, absence d’étude des alternatives, soupçons de conflits d'intérêts, démission de l’Etat et des responsables politiques, recours juridiques jugés trop tard et donc inefficaces. Tous les ingrédients pour construire le scénario du pire, qui tourne inévitablement à la confrontation. En 2011 déjà, un rapport sur la concertation environnementale présenté au président de la République soulignait que « la défiance des citoyens n'a fait que s'amplifier ces dernières années, face notamment au nombre croissant de scandales sanitaires et environnementaux ».

Trois ans après, qu’est-ce qui a changé ?

Peu de chose malheureusement. Suite à ce drame, alors que le président François Hollande s'était engagé, face à France Nature Environnement, en faveur d'un « choc de démocratie » ; une commission a produit un rapport et des ordonnances ont été faites. Elles sont sur le point d’être ratifiées au Parlement. On constate pourtant un large fossé entre les discours et la réalité dans les territoires : sur le terrain, les citoyens ont de moins en moins accès à l’information environnementale, tandis qu’on ne fait que complexifier les textes en haut lieu au détriment de tout réel progrès, de stabilité juridique, et donc de démocratie.

Pire, un projet de loi de « simplification » a encore été annoncé pour la fin de l’année. Nous espérons qu’il ne sera pas, comme d’autres textes de « simplification » l’ont été dans le passé, l’occasion de régressions du point de vue environnemental (restriction de l’accès à la justice pour les associations, affaiblissement des dispositifs d’enquête publique, régression des normes…).

Le discours actuel visant à supprimer toutes les règles qui ne sont pas imposées par l’Union Européenne, nous semble également dangereux. C’est en effet prendre le risque, sous couvert de « libérer l’économie », d’exacerber les positions et de pousser au durcissement des conflits alors que justement l’Europe préconise la transparence dans la prise de décision pour que le public soit sensibilisé et acteur de la décision

Propositions pour une démocratie vivante

France Nature Environnement souhaite qu’un chantier soit lancé afin de faire progresser réellement en France l’accès à l’information des citoyens, l’accès à la justice, le soutien aux associations, la prise en compte de l’avis des citoyens… autant de sujets fondamentaux pour une démocratie qui fonctionne ! Le mouvement avait d’ailleurs accueilli avec intérêt les engagements d’Emmanuel Macron, préalablement à son élection, qui a dit croire « en l’intelligence collective », vouloir « s’engager à renouveler le dialogue environnemental » et « proposer une méthode de travail plus collective, qui engagera également les services ministériels ». Il est donc urgent de constater ce qui fonctionne mal et le manque de moyens donnés sur le terrain avant de légiférer encore et encore. En effet, nous sommes à une période charnière pour les transitions, et tout particulièrement la transition écologique. Cette transition se fera dans – et par – les territoires.

Pour Michel Dubromel, président de France Nature Environnement : « Aujourd’hui, les décisions impactant l’environnement et l'avenir de nos territoires ne peuvent plus être prises sans concertation avec les citoyens et les organisations représentatives de la société civile organisée qui œuvrent sur le terrain. Ignorer la prise de conscience croissante sur l’impact des pollutions, le changement climatique, l'impasse de projets à courte vue et vouloir passer en force, c'est prendre le risque de créer des conflits potentiellement dramatiques. Alors qu’une concertation digne de ce nom est le meilleur moyen de faire en sorte que, quelles que soient les divergences, des projets acceptables pour tous et porteurs d’avenir, voient le jour. Nous demandons à l’ensemble du Gouvernement de ne pas reproduire les tragiques erreurs du passé. Et au Président de la République de mettre en œuvre ses engagements avec méthode. »

Pour aller plus loin

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France Nature Environnement est la fédération française des associations de protection de la nature et de l´environnement. C´est la porte-parole d´un mouvement de 3500 associations, regroupées au sein de 74 organisations adhérentes, présentes sur tout le territoire français, en métropole et outre-mer. France Nature Environnement, partout où la nature a besoin de nous. www.fne.asso.fr