Faire des économies démocratiques

Quelles formes économiques pour un renouvellement des pratiques démocratiques à l’ère néo-libérale ?

JEUDI 4 & VENDREDI 5 AVRIL
EHESS | AMPHI FRANÇOIS FURET
105, bd Raspail, 75006 Paris

 

Des associations aux dispositifs participatifs, des collectifs informels aux coopératives, des communs à l’autogestion, de la solidarité publique aux formes de financement philanthropique, de l’économie populaire au comunity organizing, ce colloque cherche à interroger de concert les conditions matérielles de la démocratie, les enjeux économiques des processus de démocratisation et les modalités d’une démocratisation de l’économie, allant des expérimentations citoyennes aux politiques publiques de promotion d’une économie plus solidaire et locale.

L’ère néo-libérale est caractérisée par une pénétration croissante de toutes les sphères de vie sociale par les logiques économiques et financières. La démocratie et le champ politique ne sont pas exempts de ces dynamiques. Si de nombreuses recherches ont été conduites visant à démontrer que les dynamiques électorales sont surdéterminées par les ressources financières des candidat.es, on en sait beaucoup moins sur les interactions entre économie et démocratie entendue au sens large comme l’ensemble des activités et des pratiques, individuelles et collectives, qui concourent à la construction du bien commun, comme si interroger le rôle de l’argent dans les processus démocratiques revenaient à « salir », trivialiser ou désacraliser des formes et des pratiques nécessairement pures et désintéressées. Si la question de l’articulation entre pratiques démocratiques et démocratisation économique a été posée depuis les années 1970 par une multiplicité d’expériences citoyennes et de réseaux (tels que le MES) critiques vis-à-vis de l’économie capitaliste, on assiste depuis quelques années à un intérêt renouvelé, autour de la question des communs, pour des pratiques non-marchandes fondées sur la réciprocité, la coresponsabilité et le droit d’usage collectif, telles que jardins partagés, troc, zones de gratuité, réseaux d’échange réciproque de savoirs, ou encore finances solidaires et monnaies locales, et ce y compris dans des secteurs associatifs relativement « institutionnalisés ».

La démocratie n’est-elle pas menacée si on ne pense pas son articulation à la démocratisation de l’économie ? Cette question a été partiellement éludée du fait de segmentations traditionnelles, historiquement ancrées dans des cloisonnements disciplinaires, entre le politique et l’économique, amenant à traiter ces deux champs de manière isolée, et invisibilisant la façon dont l’organisation économique et les ressources financières soutiennent, renforcent ou au contraire peuvent fragiliser l’action démocratique, voire entrer
en contradiction avec celle-ci. Réciproquement, il s’agit de reconnaître la dimension fondamentalement politique de certaines initiatives socioéconomiques qui favorisent l’éclosion d’espaces publics populaires, en articulant étroitement la réappropriation localisée des processus économiques, les enjeux de reconnaissance et la lutte contre les asymétries de pouvoir.

De la même manière, le colloque interroge les conditions de démocratisation des décisions économiques. Ainsi, les contraintes budgétaires et les restrictions de financement aux associations sont d’autant plus intériorisées par les acteurs qu’elles se font en l’absence d’une d’une compréhension et de débats sur les arbitrages budgétaires de l’Etat et des collectivités locales à partir d’un libre accès et traitement partagé des comptes publics. Les travaux sur la démocratie participative ne se sont que rarement attelés à la question de la démocratisation des décisions économiques et budgétaires, nombre de dispositifs ou de pratiques se trouvant le plus souvent cantonnés à des enjeux micro-locaux sans grande portée financière. Ce colloque a donc pour visée d’explorer de différentes manières la question des « économies démocratiques » : du façonnement des pratiques démocratiques par les financements publics ou philanthropiques aux conditions économiques de l’exercice de la citoyenneté, en passant par les expériences populaires de démocratisation de l’économie oeuvrant au bien-vivre et à la réduction des inégalités sociales.

>>>>Télécharger le programme

Voir l’appel à communication

Comité organisateur

Maïté Juan (Collège d’études mondiales, LISE)
Catherine Neveu (IIAC-LACI, CNRS-EHESS)
Julien Talpin (CERAPS-CNRS, Université de Lille)

Comité scientifique

Marie-Hélène Bacqué, sociologue-urbaniste, LAVUE-Paris Nanterre
Anne Bory, sociologue, Université de Lille, CLERSE
Nicolas Duvoux, sociologue, Paris 8-CRESPPA
Laurent Fraisse, socio-économiste, CNAM-LISE
Bruno Frère, sociologue, Université de Liège – FNRS
Isabelle Guérin, socio-économiste, IRD
Maria Ines Fernandez Alvarez, anthropologue, UBA, Argentine
Guillaume Gourgues, politiste, Université Lyon 2
Jean-Louis Laville, socio-économiste, CNAM-LISE
Alice Mazeaud, politiste, Université de La Rochelle
Hadrien Saiag, économiste, IIAC-LAIOS
Deena White, sociologue, Université de Montréal